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Syndrome de Minor et troubles psychiatriques : gare à la confusion ! 🤯

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Quentin Legois, kinésithérapeute spécialisé dans la rééducation vestibulaire et doctorant en neurosciences, vient de publier un article dans la revue General Psychiatry, intitulé : "Pseudo-psychiatric symptoms of superior semicircular canal dehiscence syndrome".


Article syndrome de minor confusion troubles psychiatriques
Article publié dans la revue General Psychiatry

Soit : "Symptômes pseudo-psychiatriques du syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur".


Nous vous proposons ici une traduction de l'article en français.




 

Le syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur (DCCS) a été décrit pour la première fois par Minor et al.1 en 1998 comme une condition dans laquelle le canal semi-circulaire supérieur manque de couverture osseuse. Depuis sa découverte, il suscite un intérêt croissant 2.


Les symptômes de ce syndrome sont variés, mais spécifiques à ce que l'on appelle le syndrome de Minor ou "syndrome de la troisième fenêtre mobile"3. Les patients peuvent présenter : une autophonie (perception anormalement forte de leur propre voix, de leurs pas, de leur mastication, de leur respiration, voire de leurs mouvements oculaires), une distorsion des sons environnementaux, un acouphène pulsatile.

Des études radiologiques du rocher temporal estiment que la prévalence du DCCS atteint environ 0,8 %. Cependant, bien que la prévalence anatomique soit relativement élevée, peu de patients sont adressés aux spécialistes ORL. Beaucoup de ces cas restent asymptomatiques. Toutefois, un nombre significatif de patients ne sont pas correctement diagnostiqués, même lorsqu’ils présentent des symptômes.


Confusion des symptômes du Syndrome de Minor avec des troubles psychiatriques

Les symptômes tels que les acouphènes, l’autophonie et l’hyperacousie peuvent amener les patients à consulter un psychiatre. Ceux-ci sont parfois mal interprétés comme des symptômes psychiatriques, notamment des hallucinations auditives.

Comme dans d'autres pathologies somatiques, ces erreurs de diagnostic peuvent aboutir à une fausse étiquette de trouble psychotique. Ceci entraîne : une prescription inutile de médicaments antipsychotiques, des effets secondaires associés à ces traitements.

Témoignages et conséquences du retard de diagnostic du Syndrome de Minor

Les témoignages de patients, recueillis par l’Association française du Syndrome de Minor, soulignent le manque de connaissances des professionnels de santé sur cette pathologie, conduisant fréquemment à des erreurs de diagnostic.

Ainsi, nous appelons les psychiatres à envisager le syndrome de Minor face à des patients présentant des symptômes atypiques, en particulier ceux associés à l’anxiété, la dépression ou des symptômes psychotiques.

Il est important d’interroger ces patients sur d’autres symptômes évocateurs du syndrome de la troisième fenêtre mobile, tels que : l’hyperacousie aux sons transmis par l’os, le vertige déclenché par le son ou la pression, l’acouphène pulsatile. Tout patient présentant ces signes devrait être orienté vers un spécialiste ORL1.


Syndrome de Minor : un impact psychologique et psychiatrique majeur

En plus du besoin de poser un diagnostic différentiel en psychiatrie, le syndrome de Minor peut entraîner des troubles psychiatriques secondaires.

Comme dans d'autres pathologies affectant la qualité de vie, un diagnostic tardif et une prise en charge inadaptée peuvent conduire à : la dépression, des idées suicidaires. Une étude récente sur 210 patients atteints du syndrome de Minor a révélé des taux significativement élevés de : troubles anxieux (31,4 %), troubles dépressifs (22,9 %)11.


Témoignages des patients

Des membres de l’Association du Syndrome de Minor rapportent que l’impact de leurs symptômes les a poussés à consulter un psychiatre. Certains témoignages illustrent la souffrance quotidienne des patients : Une femme a dû arrêter la danse, car le bruit de ses talons résonnait dans son crâne. Un chauffeur routier a dû quitter son emploi à cause de son hyperacousie. Plusieurs patients ont abandonné les concerts en raison de leur sensibilité au bruit. Un patient a constaté une aggravation de ses acouphènes après un rapport sexuel.


Selon une enquête réalisée auprès de 110 patients, 18,2 % ont déclaré avoir eu des idées suicidaires à cause de leur syndrome. L’association rapporte également que deux de ses membres se sont suicidés ces dernières années.


Vers une meilleure reconnaissance médicale

Un diagnostic précoce est crucial pour réduire le fardeau psychiatrique du syndrome de Minor.

Des données récentes indiquent qu’un soutien psychiatrique et psychologique proactif réduit la détresse chez les patients atteints de maladies chroniques 12 13.

De plus, la chirurgie semble améliorer non seulement les symptômes physiques du syndrome de Minor, mais également les troubles dépressifs associés 1.

Notre objectif est d’alerter la communauté psychiatrique sur ce syndrome encore méconnu.

Ces patients vivent souvent dans une incertitude médicale, ce qui les pousse à consulter un psychiatre. Il est essentiel de leur offrir un suivi étroit, compte tenu du risque accru de troubles psychiatriques et de suicidalité 11.


Perspectives de recherche

À ce jour, cette problématique a été peu étudiée. Une cohorte prospective, analysant : le diagnostic psychiatrique, l’usage de médicaments psychoactifs, les symptômes psychologiques ; pourrait fournir des informations précieuses sur le lien entre DCCS et troubles psychiatriques.


 

Quention Legois

Quentin Legois est un kinésithérapeute spécialisé dans la rééducation vestibulaire. Diplômé de HELD (Haute École Libre de Bruxelles) en 2019, il travaille dans le service ORL du Pr. Deguine. Après avoir obtenu son master en neurosciences à l'UCL (Université Catholique de Louvain, Belgique), il est désormais doctorant en neurosciences à l'Université Toulouse Paul Sabatier sous la direction du Pr. Mathieu Marx, oto-neurochirurgien. Sa recherche doctorale porte sur le syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur et s'intéresse particulièrement au rôle des tests électrophysiologiques dans l'évaluation de l'impact symptomatique. Sa thèse s'intitule : « Intérêt des explorations électrophysiologiques dans l'évaluation du retentissement symptomatique de la déhiscence du canal semi-circulaire supérieur ».



 

Correspondance : Dr Valentin Raymond – raymond.v@chu-toulouse.fr

Aucun financement déclaré.

Aucun conflit d’intérêts déclaré.

🔗 Accès libre sous licence CC BY-NC 4.0 - Consulter les droits


Article dans General Psychiatry · Février 2025

DOI : 10.1136/gpsych-2024-101837


8 auteurs :

Quentin Legois, Yohan Gallois, Mathieu Marx, Olivier Deguine, Antoine Yrondi, Maximilien Redon, Christophe Arbus, Valentin Raymond

Citation recommandée :

Legois Q, Gallois Y, Marx M, et al. Symptômes pseudo-psychiatriques du syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur. General Psychiatry 2025;38:e101837.

doi:10.1136/gpsych-2024-101837


Références :

  1  Minor LB, Solomon D, Zinreich JS, etal. Sound- and/or pressure- induced vertigo due to bone dehiscence of the superior semicircular canal. Arch Otolaryngol Head Neck Surg 1998;124:249.

  2  dos Santos CAL, Silva JR de L, Filho VMB, etal. Letter to the editor regarding “the history of superior semicircular canal dehiscence: a bibliometric analysis”. World Neurosurg 2024;188:240–3.

  3  Naert L, Ocak I, Griet M, etal. Prospective analysis of an evidence- based symptom set in superior canal dehiscence syndrome. Otol Neurotol 2021;42:e186–92.

  4  Klopp- Dutote N, Kolski C, Biet A, etal. A radiologic and anatomic study of the superior semicircular canal. Eur Ann Otorhinolaryngol Head Neck Dis 2016;133:91–4.

  5  Kasle DA, Tower JI, Savoca E, etal. Superior semicircular canal dehiscence: a case report and literature review of an otologic condition associated with severe psychiatric disturbance and suicide attempt. J Psychiatr Pract 2022;28:505–8.

  6  Gama Marques J. Twenty years of misdiagnosis of schizophrenia in a patient with Dandy- Walker variant syndrome. Gen Psych 2019;32:e100031.

  7  Walker KN, Guy KM, Volsky PG. Delayed diagnoses in patients with dizziness in the US Commonwealth of Virginia and the Tidewater Region. Otol Neurotol Open 2023;3:e046.

  8  Benyo S, Saadi RA, Isildak H. Diagnostic delays in superior semicircular canal dehiscence. ORL J Otorhinolaryngol Relat Spec 2023;85:112–4.

  9  Association syndrome de MINOR ou déhiscence du canal semi- circulaire supérieur (SDCS). 2021. Available: https://www.syndromedeminor.org/

 10  Ward BK, van de Berg R, van Rompaey V, etal. Superior semicircular canal dehiscence syndrome: diagnostic criteria consensus document of the committee for the classication of vestibular disorders of the Bárány Society. VES 2021;31:131–41.

 11  Wang BL, Bartholomew RA, Dattilo LW, etal. Association between superior canal dehiscence syndrome and anxiety and depressive disorders. Laryngoscope 2024;134:3879–80.

 12  Khaustova OO, Markova MV, Driuchenko MO, and al. Proactivepsychological and psychiatric support of patients with chronic non- communicable diseases in a randomised trial: a Ukrainian experience. Gen Psych 2022;35:e100881.

 13  Sharpe M, Toynbee M, Walker J, etal. Proactive integrated consultation- liaison psychiatry: a new service model for the

psychiatric care of general hospital inpatients. Gen Hosp Psychiatry  2020;66:9–15.

 14  Wackym PA, Balaban CD, Mackay HT, etal. Longitudinal cognitive and neurobehavioral functional outcomes before and after repairing otic capsule dehiscence. Otol Neurotol 2016;37:70–82.

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©Association "Syndrome de Minor ou Syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur".

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